Pascal Rollet / Domaine du Clos de la Chapelle
La Citroën SM Maserati au gros moteur V6 aura été un incroyable coup d’audace pour la marque avec ce coupé de prestige qui cotoyait ses 2CV dans les années 70. Mais son succès fut éphémère.
Dans la vie, il y a des fascinations de jeunesse qui perdurent encore à l’âge adulte. Pascal Rollet, un des grand vignerons du Pouilly-Fuisse, ne vous dira pas le contraire dans son caveau du Clos de la Chapelle aux vignes centenaires. Lorsque la Citroën SM Maserati est sortie en 1970, il n’avait que 12 ans mais, déjà, l’œil aiguisé pour voir dans ce coupé à la ligne d’avant garde taillée par le vent, et motorisé par un V6 Maserati, une voiture d’exception aux accélérations rageuses.
Un futur collector. Quinze ans plus tard il a fini par réaliser son rêve en s’offrant une Citroën SM Maserati d’occasion de 1973. « Elle est pour moi l’aboutissement de la perfection dans l’histoire fascinante de Citroën, ma marque fétiche. » Malgré sa courte existence de 1970 à 1975 avec seulement 12 920 exemplaires produits, la Citroën SM Maserati (pour projet S et M comme Maserati), la plus extravagante GT française, continue aujourd’hui de frapper les esprits par sa modernité pour l’époque.
Pascal Rollet s’en rend bien compte quand il en prend le volant pour faire le tour de ses clients en Suisse, et en Allemagne (« où je peux rouler très vite sur les autoroutes… »). « Ils ont pris l’habitude de me voir arriver avec cette auto surprenante qui attire la sympathie. Si bien qu’elle contribue aussi à l’image de marque et la réputation de mon vignoble! » A sa sortie, la Citroën SM Maserati a bien évidemment hérité de la révolutionnaire suspension hydropneumatique des DS, mais avec quantité d’innovations en plus.
Pour la rendre aérodynamique, le styliste Robert Opron (à qui on doit aussi la GS et la CX) a carrément caréné sous une calandre plexiglas la plaque d’immatriculation avec la rampe des six phares à iode, dont deux directionnels, avec un réglage hydraulique permanent en hauteur des projecteurs selon l’inclinaison de la voiture, de façon à ce que le faisceau reste toujours parallèle à la route !
Le bureau d’études de Citroën inaugure aussi sur la SM la première direction hydraulique asservie dont le débattement du volant se durcit avec la vitesse pour assurer une tenue de cap sans égal , et avec un retour automatique au point zéro pour rester en ligne droite, une sécurité en plus des 4 freins à disques à assistance hydraulique. Pour la première fois en Europe, les possesseurs de Citroën SM Maserati bénéficient aussi d’un réglage en hauteur et en profondeur du volant qui rajoute du confort au conducteur.
Pour mener à bien son projet de super coupé de prestige, Citroën qui, faute de moyens, se contentait dans ses DS de l’ancien 4 cylindres de la Traction amélioré, a profité la mise en vente de Maserati en 1968 pour pouvoir se doter d’un V6 de haut niveau. Afin de satisfaire très vite (en deux mois !) la demande du patron de Citroën Pierre Bercot, Alfieri, l’ingénieur en chef de Maserati utilisera le V8 maison datant de 1954 en lui retirant 2 Cylindres. Histoire de se donner ensuite le temps de concevoir entièrement un V6 plus moderne en tenant compte des exigences de Citroën : un moteur de 170 ch, de même encombrement que le 4 cylindres de la DS, et ne dépassant pas 2,7l pour éviter l’assommoir fiscal d’une grosse vignette !
Hélas, par manque d’information du réseau Citroën sur les réglages très pointus de ce puissant moteur, de gros ennuis de casse se multiplieront sur les trois chaines de distribution. Mais pour l’heure, la présentation de la SM au salon de l’Auto va provoquer surprise et engouement pour cette nouvelle GT unique en son genre par sa ligne audacieuse et son intérieur luxueux avec sa sculpturale planche de bord aux cadrans ovales. Les amateurs de voitures de sport ayant une famille à transporter s’entichent de cette nouveauté décoiffante avec son V6 2670 cm3 gavé par 3 carburateurs Weber double corps qui dégage 170 chevaux caracolant à 220 km/h (et 178 ch avec l’injection en 1973).
Les ventes s’envolent avec 5032 modèles en 1971 malgré son prix de 100 000 francs deux fois plus cher qu’une DS 23. Même aux Etat-Unis les aficionados de Citroën commandent 2037 Citroën SM Maserati en 1972-73. Inespéré ! Mais le ciel va s’assombrir pour la belle franco-italienne en 1973 pour 3 raisons. Avec la flambée du prix du pétrole par l’Opep qui frappe de plein fouet cette gourmande en carburant. Avec la multiplication des casses moteur qui refroidissent les acheteurs. Et surtout un changement de la réglementation des parechocs aux Etats-Unis en 1974 va rendre impossible la vente de la Citroën SM Maserati dont il faudrait entièrement changer l’audacieux profilé à l’avant.
C’est le coup de grâce pour la voiture sur le marché américain qui représentait ¼ des Citroën SM Maserati vendues. Et l’année 1974 se termine en désastre avec seulement 294 ventes au total. Pour la deuxième fois de son existence, après le lancement ruineux de la Traction en 1934 où Citroën avait alors été racheté par Michelin, le constructeur est au bord de la faillite. Du coup le fabricant de pneus revend Citroën à Peugeot. Et la marque au lion va faire le ménage.
Maserati est revendu, privant à terme de moteurs la Citroën SM dont l’arrêt de mort à été décidé par la direction de Peugeot pour ne pas gêner le lancement de son futur modèle haut de gamme : la 604 au moteur V6 de seulement 136 ch pour une cylindrés équivalente (2664 cm3) au Maserati de la SM. Pas très glorieux effectivement… Chez Citroën, l’heure est à la désillusion. La prestigieuse SM au V8 4 litres de 260 ch restera un prototype sans lendemain. Quant au projet de CX à moteur Maserati, il est bien évidemment stoppé net. Et en 1975 c’est chez le petit constructeur Ligier que les 115 dernières SM seront assemblées au côté de ses… voiturettes sans permis. Triste naufrage pour l’ex vaisseau amiral de Citroën !
LA MÊME MARQUE AUJOURD’HUI
NOUVELLE DS 4, UNE DÉESSE QUI EN JETTE SUR LA ROUTE
Avec le quatrième modèle de la marque premium française créée en 2015, cette dernière DS4 entend bien affronter ses rivales allemandes. Avec de solides atouts. Un confort inégalé par sa suspension pilotée par caméra. Et un niveau d’équipements haut de gamme qu’on ne trouve que dans des modèles plus chers…lire la suite
LE VIGNOBLE
Une parcelle des 7,65 ha de son vignoble se situe à un endroit mythique : juste en dessous de la Roche de Solutré rendue célèbre par les « pèlerinages ascensionnels » de la liturgie Mitterandienne. Pascal Rollet, fils d’agriculteur du Charolais a dû s’imposer ici parmi les vignerons qui ne le considéraient pas comme des leurs. En commençant comme tâcheron, puis métayer pendant 25 ans de la propriétaire parisienne des 3,45 ha du fameux Clos de la Chapelle aux vignes centenaires qu’elle a fini par lui vendre en 2005 par fidélité. Depuis, il s’est agrandi sur Pouilly-Fuisse, Saint Véran et moult médailles ont récompensé ses vins sans sulfites et ciselés avec leur étonnante fraicheur aromatique. Aujourd’hui, Pascal Rollet est un vigneron heureux. Depuis que son fils Thomas, après des études en droit, a choisi de revenir au domaine il y a cinq ans. Parti de rien, Pascal Rollet savoure cette reconnaissance de son travail avec sa femme Catherine, et de son savoir faire qu’il est ravi de transmettre pour perpétuer cette nouvelle dynastie du vignoble.
MES VIN PRÉFÉRÉS
Pouilly-Fuissé Les Grands Climats 2019 Un blanc très floral avec de douces senteurs d’acacia et une tension subtile sur un fruité au nez comme en bouche (14,90 €)
Pouilly-Fuisse « Vieilles vignes » 2019 Cette parcelle plantée il y a 60 ans donne un blanc profond et dense sur une ligne ciselée, la marque de fabrique de Pascal Rollet, avec une allonge sans fin en bouche sur une minéralité légèrement saline (16,50 €)
Pouilly-Fuisse Clos de la Chapelle 2019 Ces vieilles vignes donnent encore un sublime nectar au fruité intense sur une minéralité très typée par le terroir davantage calcaire de cette parcelle centenaire (27 €)
Saint Véran « Madame Noly »2019 Une flèche d’un trait sur une bouche tendue constante en fraicheur portée par un remarquable équilibre aromatique fruité-minéral (11,80 €)