Mythique, cette Corvette Chevrolet lancée aux USA en 1953 poursuit son épopée dans un vignoble de Provence. En restant aussi unique et sublime qu’à ses débuts où elle avait frisé le flop commercial.
CHÂTEAU RÉAL-MARTIN / Jean-Marie Paul
« La beauté d’une voiture est comme celle d’un tableau » vous confie -t- il dans son vignoble du Château Réal Martin en Provence, juste à côté de Miraval, celui de Brad Pitt. Esthète à ses heures quand il ne s’occupe pas de ses vignes ou de son activité de patron du traiteur Butard Enescot, Jean-Marie Paul est aussi collectionneur de belles autos anciennes, Jaguar, Porsche, AC Bristol…plus cette superbe Corvette Chevrolet de 1958, «pas très discrète » concède –t-il, qui vient compléter le tableau.
Et c’est bien son look sans pareil, reflet de l’exubérant délire américain de l’après guerre en matière de design automobile qui l’a fait craquer en premier. «Plus que l’agrément de conduite » reconnaît il, lui qui est habitué aux voitures de sport européennes à la fois puissantes et nerveuses. Ce n’était pas le cas effectivement de la Corvette Chevrolet à son lancement en 1953.
DEMARRAGE EXPRESS
Devant l’engouement du public le 17 janvier de cette année là ,lors de la présentation à un show automobile à New York de l’audacieux prototype EX-122 dessiné par le génial styliste maison Harley Earl, General Motors avait décidé de démarrer sa production seulement six mois après !
Mais un lancement un peu trop hâtif. En improvisant une chaine provisoire de fabrication à la main dans une ancienne usine de camion à Flint. Et en recyclant des pièces, chassis, moteur, trains roulants, déjà utilisés sur la berline Chevrolet d’après guerre pour réduire les couts. Le résultat sera catastrophique. Pourtant séduisante, cette auto est en plus révolutionnaire avec la première carrosserie plastique renforcée de fibres de verre.
Et la ligne fulgurante de cette première voiture de sport américaine dégage une sensation de puissance et de vitesse. Mais son poussif 6 cylindres 3,9 l de 150 ch en boite automatique à 2 vitesses avec un 0 à 100 km/h en 11,6 secondes ne répond pas du tout à cette attente. Alors que l’Amérique commence à s’enticher de la mode des petits bolides ramenés à leur retour d’Europe par les GI’s à bord de Jaguar, MG, Triumph, Porsche ou Alfa Romeo.
En plus pour ne rien arranger, la Corvette Chevrolet lancée trop vite souffre de multiple défauts qui refroidissent un peu plus les clients : 185 voitures seulement seront vendues la première année sur les 300 produites ! Sur les 10 000 exemplaires prévus en 1954 avec une toute nouvelle usine de montage, la production ne montera qu’à 3640 exemplaires, dont 1/3 invendus.
MENACÉE DE MORT
Et la dégringolade sera pire en 1955 avec 700 ventes ! Devant ce fiasco commercial, General Motors, le géant de Detroit qui fabrique 2 millions de voitures par an songe à arrêter les frais pour des volumes de véhicules aussi insignifiants. Mais deux événements vont sauver la Corvette chevrolet.
Car Ford, pour contrer Chevrolet, a lancé à son tour cette année là sa première voiture de sport, la fameuse Thunderbird au V8 de 4,7 l 202 ch 185 km/h. Contre 160 pour la Chevrolet qui a donc vu ses ventes chuter. Mais par orgueil vis à vis de son rival de Detroit, il n’est pas question chez General Motors que la Corvette chevrolet lui laisse le champ libre.
LA REVANCHE
Du coup, le N°1 mondial de l’automobile va se donner les moyens de rebondir ! En mettant sous son capot le tout nouveau moteur Chevrolet V8 de 195 ch à boite manuelle 3 vitesses. Requinquée, la Corvette de fin 1955 va enfin relancer ses ventes. En même temps que la course à la puissance va la propulser sur les podiums de course.
De 195 ch, la Corvette Chevrolet de 1956, relookée avec des carrosseries bicolores plus flashy, grimpe à 210 ou 240 ch et voit ses ventes remonter à 3467 exemplaires. L’année suivante, son V8 4,3 l passe à 4,6 l et 283 ch grâce à une nouveauté, l’injection. Les clients apprécient de plus en plus : 6339 ventes .
QUATRE DENTS EN MOINS
En 1958, année de la voiture de notre gentleman-vigneron Jean-Marie Paul , la Corvette perd quatre dents ( ! ) sur son agressive calandre proéminente. Elle en compte désormais 9, mais gagne 7 chevaux, des chromes supplémentaires, plus 4 phares au lieu de 2.
Bingo : 9168 modèles sont produits en 1958. Et en apothéose, pour la dernière année de son existence en 1962, la Corvette chevrolet au V8 maintenant de 5,4 l déboulera à 300, voire à 360 ch. Devenant à tout jamais l’emblématique marque de sport américaine. Car après les 69 015 Corvette C1 produites depuis 1953 se succéderont huit générations de plus en plus puissantes. Avec aujourd’hui une C8 de 6,2 l et 495 chevaux. Moins élégante, mais plus bestiale !
OENOTOURISME
LE VIGNOBLE
Sur les chemins cahotiques escaladant les coteaux de ses vignes de Réal Martin, près de Brignoles dans le Var, Jean-Marie Paul au volant de son 4X4 est intarissable : “En 2001, j’ai eu le coup de foudre pour ce vignoble de 40 hectares, magnifique par son terroir, son exposition privilégiée, et son altitude à 350 m qui donne de la fraicheur au fruit la nuit. “ Un domaine qui, du temps des Comtes de Provence, faisait 1500 hectares, englobant aussi le vignoble de Miraval. Celui de ses voisins Brad Pitt et Angelina Jolie. Il réveille alors cette belle endormie, replante en Cinsault, Grenache, syrah et Rolle, crée une cuverie thermorégulée pour mieux maitriser la qualité et des chais pour l’élevage en barriques. Une deuxième passion est née chez ce patron du traiteur Butard Enescot : ”Faire son vin procure une énorme satisfaction. Un bon vin et ses assemblages de cépages ressemble à une oeuvre d’art. Comme pour un peintre qui avec ses tubes de couleur réalise une belle composition. »
AMBASSADEUR DE LA PROVENCE
Comme son rouge Optimum au fruité dense et velouté, élevé 1 an en cuve et 12 mois en futs de chêne. Au côté des blancs et de ses rosés à la fraicheur minérale (60% de la production) qui font un tabac aux Etats-Unis. Ce qui lui fait dire, “je m’auto proclame ambassadeur des rosés de Provence !”
AU CATALOGUE
Optimum rouge 2006: syrah, grenache, cabernet de 30 ans
Bouche ample et fruitée, tanins soyeux sur une palette d’aromes nuancés 21 €
Château Réal martin rouge 2013 : 60% syrah et 40% cabernet d’age moyen 35 ans
Tanins soyeux, fruité griotte et notes pôivrées 14 €
Cheval Martin rouge 2016 : 80% syrah, 10% cabernet, 10% cinsault vignes de 15 ans Nez puissant poivré, aromes de fruits noirs de cacao et d’épices 10 €
Grande cuvée rosé 2016 : 50% Grenache, 20% cinsault, 10% syrah, 20% mourvèdre, age moyen 25 ans
Fraicheur fruitée et minérale sur une bouche soyeuse 13 €
Perle de rosé 2016 : 40% Grenache, 30% cinsault, 20% syrah, 10% rolle age moyen 25 ans
Plus croquant en bouche et lgèrement citronné 9,50 €
Blanc de blancs 2016 : 100% rolle de 35ans
Fruité pêche-abricot légèrement épicé sur une finale tout en rondeur 14 €
PROFITEZ EN POUR VISITER …
-L’ancien Brignoles et son dédales de ruelles médiévales qui grimpent jusqu’au splendide palais comtal, l’actuel musée
-Le vieux village colline de Barjols où l’eau coule à flot dans les rues escarpés jalonnées de 28 fontaines et 14 lavoirs, splendide place en pente ombragée sous les platanes , vue splendide sur le vallon depuis le haut
-Cotignac, village escarpé, aussi charmant que Barjols, au pied d’une falaise creusée d’habitations troglodytes et surmonté de deux tours de guêt médiévales
-La célèbre abbaye du Thoronet au pur style roman très dépouillé
-L’imposante Chartreuse de La Verne à Collobrières fondée en 1170 sur un éperon rocheux au Coeur de la forêt des Maures
-Saint Maximin la sainte Baume et la plus belle basilique en gothique provençal, ses rues en arcades, ses vieilles maisons à colombages, son beffroi, le couvent royal et son cloître
-Collobrières, pittoresque village ombragé dont la spécialité est le marron glacé et l’exploitation du liège des forêts environnantes