CHAMPAGNE BRUNO PAILLARD
Pour ce fan d’anciennes, la DS cabriolet est la sublimation de la célèbre berline, révolutionnaire à sa sortie il y a 66 ans. Une beauté à la robe superbe, entrée au Panthéon de l’Automobile !
« Les voitures sont comme les champagnes, dit Bruno Paillard, créateur de la marque portant son nom à Reims : elles ont aussi leurs grands millésimes, telle la DS Citroën en 1955. » Et encore plus dans sa sublime version cabriolet, à en juger par sa collection personnelle : en deux décennies, il en a déniché quatre exemplaires différents de 1965, 1967 et 1968. Histoire de retracer leur évolution qui a suivi celle de la berline DS 19 équipée au départ du 1911 cm3 de la Traction à 75 ch , puis 83ch ,90 ch, et ensuite de la DS 21 passée de 109 ch en 1966 à 115ch-177 km/h deux ans plus tard avec un nouvel avant à phares carénés.
Pourquoi une telle fascination chez ce « DSmaniaque » qui a également une DS 19 ? « Il y avait une touche de génie français dans cette ligne si audacieuse par rapport aux voitures de l’époque, s’explique -t-il. De plus, cette auto, qui fut celle de de Gaulle, a été la vitrine du prestige la France dans le monde à l’égal du champagne. » Et une nouvelle révolution française qui a ébranlé le monde en matière d’automobile. Car sa révélation le 6 octobre 1955 à Paris à l’ouverture du Salon de l’Automobile relèvera du choc culturel provoqué par un ovni débarqué d’une autre planète. Cette DS 19 ne ressemble alors à aucune autre des voitures présentées sur les stands. Par son look et ses solutions techniques inédites.
Son dessin, digne de l’aérodynamisme aéronautique, lui donne un coefficient de pénétration dans l’air ahurissant pour l’époque de 0,36 obtenu par une savante combinaison d’astuces : des roues arrières carénées, un grand parebrise galbé, des vitres latérales affleurantes grâce aux portières sans encadrement avec, au dessus, une ligne de gouttière chromée fuyante qui se termine par des « cornets-clignotants » en haut du pavillon arrière. Une façon originale d’accentuer la fluidité dynamique de cette DS 19 fendant l’air à 140 km/h avec son profil de toit épousant la même inclinaison que la lunette arrière et le coffre.
Fini les voitures carrées ! Et à l’avant, l’immense capot accentue son profilage en pointe grâce à la suppression de la traditionnelle calandre chromée qui s’imposait jusque là chez tous les constructeurs pour afficher leur identité. Pas besoin de cet appendice encombrant pour une DS Citroën ! Sa différence lui suffit pour affirmer son nom. Au point que les chevrons n’y figurent nulle part. Et le design décoiffant de la DS se poursuit dans son spacieux habitacle vitré, entre d’opulentes banquettes canapés moelleuses, une sculpturale planche de bord de science fiction (en nylon !) et un étrange volant monobranche donnant l’impression de tourner dans le vide !
Côté technique, le public du salon de 1955 hallucine aussi : jamais on n’a vu une voiture monter toute seule sur ses roues ! C’est la botte secrète de Citroën pour sa voiture la plus confortable du monde. La fameuse suspension « tapis volant » dont l’hydraulique gère aussi le freinage, la boite de vitesse, l’embrayage, la direction assistée. Hélas, la mise au point de cette invention géniale, mais complexe, n’était pas encore totalement fiabilisée. Et pour combler la chute des ventes de la vieille Traction de 1934, la sortie prématurée de la DS qui n’est pas prête générera fuites et fâcheuses pannes à répétition pendant un an chez des clients furieux d’avoir payé cher une voiture soit disant exceptionnelle.
Et en catastrophe, face aux centaines annulations de commandes, Citroën sera obligé de mettre sur pied des équipes volantes pour aller les dépanner ou les rapatrier à l’usine. Afin d’analyser les problèmes que les concessionnaires, dépassés, ne savent pas traiter, faute de formation sur ce nouveau package hydraulique par Citroën qui voulait préserver ainsi le secret sur la sortie de cette DS. Néanmoins, pour l’instant, au Salon de l’Automobile sous la verrière du Grand Palais, l’heure est à la surprise, la stupeur, l’éblouissement et l’enthousiasme où l’on enregistre 12 000 commandes le premier jour.
Parmi les visiteurs, Henri Chapron, le grand carrossier de Levallois, est subjugué par la ligne de cette DS 19, et y voit un moyen de rebondir dans son activité en déclin depuis l’apparition récentes des caisses monocoques chez les constructeurs. Et la disparition des grandes marques de luxe d’avant guerre comme Delage, Bugatti, Delahaye ou Hispano qui s’adressaient à lui pour « habiller sur mesure » leurs voitures à destination de clients aisés voulant se singulariser.
C’est décidé. Cette incroyable berline DS 19, il va la métamorphoser en un superbe cabriolet ! Et en 1958, Chapron présente une DS cabriolet qui fait sensation sur son stand au Salon de l’Auto : le modèle « Croisette », avec portières rallongées et parebrise rabaissé. Séduite, la direction de Citroën qui n’a pas prévu une déclinaison de la DS 19 en cabriolet lui propose un accord de production en série dans ses ateliers de Levallois. Pendant deux ans les équipes Chapron et Citroën travaillent sur le renforcement de la future DS cabriolet pour la sécuriser au maximum, et sur la réduction de son coût de fabrication.
Avant le lancement en 1961 où ce cabriolet de luxe, valant deux fois plus cher que la berline, sera vendu dans le réseau Citroën. Les clients bénéficiant ainsi de la garantie du constructeur sur les « cabriolets usine » fabriqués à 1365 exemplaires jusqu’en 1971. Et parallèlement, Henri Chapron sortira 236 unités de ses propres cabriolets et coupés encore plus onéreux avec leurs carrosseries spéciales aux noms évocateurs du prestige français, « Palm Beach », « Paris », « Concorde », « Le Dandy »…
Hélas, l’arrêt de la production de la DS cabriolet en 1971 marquera une grosse baisse d’activité chez Chapron. L’atelier de Levallois qui avait employé jusqu’à 320 personnes avant guerre passera à une vitesse artisanale avec des séries limitées de voitures présidentielles sur Citroën SM cabriolet pour Pompidou, CX, Peugeot 604 ou des voitures blindées. A 92 ans, Henri Chapron décédera en 1978. Et sa femme poursuivra l’activité jusqu’en 1985 où la célèbre carrosserie Chapron fermera définitivement ses portes. Et le livre d’une belle épopée automobile.
LA MÊME MARQUE AUJOURD’HUI
DS 9 LE NOUVEAU HAUT DE GAMME À LA FRANÇAISE
Avec la DS9, la marque premium du groupe Peugeot-Citroën a sorti tous ses atouts pour contrer ses rivales allemandes sur le luxe et le confort. En moins cher. Et en rajoutant du courant sous le capot de cette grande berline hybride de 225 ch en combinant les deux énergies. La DS9 fait elle aussi bien que la première DS de 1955 qui était en avance sur son temps et balayait ses concurrentes ? Difficile de refaire deux fois la révolution du siècle en automobile. Mais en tout cas, la DS9 a tout fait pour conserver les gênes de son illustre ainée. A défaut de l’inégalable suspension hydraulique à l’effet de tapis volant, la DS9 assure un confort au dessus du lot par sa suspension active qui anticipe les cahots en réglant les amortisseurs grâce à une caméra qui lit la route devant elle. Si en 2021, il n’y aura malheureusement pas de déclinaison de la nouvelle DS en cabriolet, elle sortira néanmoins dans une autre version survoltée à 360 ch, la plus rapide de son histoire...lire la suite
OENOTOURISME
MON VIN PRÉFÉRÉ
En 1981, ce courtier en raisin issu d’une famille de vignerons vendait 50 000 francs ses deux voitures de collection, une Traction Citroën et une Jaguar MKII, pour financer le lancement de sa propre marque marque de champagne. Aujourd’hui Bruno Paillard représente un vignoble de 34,4 ha, dont 10 dans les Grands Crus, soit 70 % des approvisionnement pour ses 400 000 bouteilles annuelles. Outre le rapprochement avec Boizel en 1994, le groupe qu’il a constitué en tandem avec Philippe Baijot a racheté les champagnes Philipponat, de Vénoge, Alexandre Bonnet aux Riceys, puis Lanson en 2006. Mais pour les différentes cuvées haut de gamme de sa marque, Bruno Paillard a toujours mis la priorité, non pas à la course aux volumes, mais à la qualité des raisins pour mettre en valeur la richesse de la minéralité crayeuse des terroirs champenois les plus prestigieux. Il croyait friser l’excellence avec la Première cuvée. Mais ce fin connaisseur a grimpé une marche supplémentaire avec une nouveauté originale, la Cuvée 72 qui en est le prolongement. Rien à voir avec une question de millésime ancien à écouter son explication: « C’est très simple. Élevée 36 mois sur lies, cette cuvée Extra-Brut connait 36 mois de maturation supplémentaire en bouteille dans nos caves après son dégorgement. 36+36=72 mois de patience où ce champagne de la Première Cuvée évolue vers des arômes plus floraux, épicés, voire toastés ». En bouche cet Extra Brut est en fait d’une douceur surprenante par sa finesse, comme celle de ses bulles, et sa sapidité constante sur une finale bien tendue qui fait que les flutes descendent très vite ! (52 €) www.brunopaillard.com
PROFITEZ EN POUR VISITER…
REIMS
*La cathédrale, célèbre chef d’oeuvre de l’art gothique depuis 1211, où furent couronnés 25 rois de France après le baptême de Clovis en 498. La plus longue de toutes avec ses 149 m, elle a été miraculeusement rescapée après les destructions des bombardements de 14. Le fameux « Ange au sourire », statue emblématique du porche, peut en effet afficher son soulagement !
*Les caves à champagne dans les anciennes carrières de craie, Pommery, Veuve Cliquot et son dédale de 20 km de galeries, Taittinger sous l’ancienne abbaye Ste Nicaise, et celles de Lanson dont les galeries voutées servirent de logements pendant les bombardements de la guerre de 14, et même de chapelle avec un vestige qui subsiste aujourd’hui, une statue de la Vierge toujours accrochée sur la paroi.
*Le festival de façades Art déco, symboles de la reconstruction de la ville détruite à 80 % pendant la guerre de 14
*L’Hotel musée Le Vergeur XIII éme et Renaissance construit par un riche marchand grainetier
*L’abbaye St Remi, du nom de l’évêque qui baptisa Clovis, ses parties romanes, XVII ème et son grand cloître
*L’impressionnante porte gallo-romaine de Mars du temps où Reims s’appelait Durocortorum et dépassait en importance Lutèce qui deviendra Paris
*Le palais épiscopal du Tau et sa grande salle à voûte de bois en carène de navire renversée où se tenait le festin des rois après leur sacre. Le palais abrite aujourd’hui un musée sur la cathédrale où l’on réalise, en les voyant, que les statues d’origine sur sa façade mesuraient près de 5 mètres de hauteur !
*Hôtel Jean-Baptiste de La Salle édifié à partir de 1545. Belle cour Renaissance avec avec une tour à escalier à vis ajouré
*La demeure XIIIème des comtes de Champagne
*La villa Demoiselle, splendide témoin de l’Art Nouveau construit entre 1904 et 1908 sur la butte Ste Nicaise par Louis Majorelle pour le directeur des Caves Pommery
*Le musée des Beaux-arts, un des plus beaux de province avec ses collections de tableaux et de sculptures du XVI ème au XX ème : Le Nain, Boucher, Corot, Monet, Pissaro, Renoir, Gauguin, Maillo, Marquet, Foujita, Rouault, Manessier,…
*Le phare de Verzenay, un vrai phare au milieu d’une mer de vignes construit en 1909 par le négociant en champagne Joseph Goulet pour faire la promotion de sa maison. Le rez de chaussée faisait guingette, et en 1940 les Anglais placèrent sur le phare une batterie anti-aérienne. Après restauration en 1999 le Musée de la Vigne y a ouvert ses portes.
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POUR UNE HALTE UN CHOIX S’IMPOSE
Le Château de Sacy, appartenant à la collection Millésime, se dresse sur la montagne de Reims dans le charmant village de Sacy. Cette Maison de Maître peut accueillir tous les voyageurs passionnés d’automobiles avec un parking loin des tumultes citadins.
En plein cœur des vignes, ce joyau intimiste offre 12 chambres et suites, un restaurant avec une cuisine raffinée mettant en avant les produits du Terroir et un espace bien-être Ec(h)o en collaboration avec la marque française de cosmétique naturelle minérale Gemology.
Tout rappelle dans cet écrin l’histoire du et de la Champagne. Une parenthèse pour vous faire vivre une expérience pétillante et unique…
Château de Sacy, rue des Croisettes, 51500 Sacy.
Informations et réservations : +33 (0) 26 07 60 38 – contact@chateaudesacy-reims.fr https://www.chateaudesacy-reims.fr/
*Les Halles du Boulingrin et leur spectaculaire voute en béton de 19,85 m de haut et seulement 7 cm d’épaisseur construite en 1927.
*Le fort de la Pompelle . Symbole de la résistance rémoise pendant la deuxième guerre mondiale, il fut le seul de la région à rester aux mains des Français jusqu’en 1918 au prix de 12 000 morts. Aménagé en musée des tranchées on y trouve une étonnante (et unique!) collection de 500 couvre chefs de l’armée allemande.
*La bibliothèque Carnegie, chef d’oeuvre de l’Art Déco avec son entrée en mosaïque et son gigantesque lustre suspendu en vitrail.
*Le musée automobile de Reims-Champagne, 230 autos et motos de 1908 à nos jours, un festival de Delahaye, Delage, Panhard, et de voitures à pédales ! (84 Avue Georges Clemenceau/ 03 26 82 83 84/musee-automobile-reims-champagne.com)
EPERNAY et alentours
*Flanez le long des 1500 m de l’avenue de Champagne pour admirer tous les hôtels particuliers où se sont installées les grandes marques champenoises au dessus de leurs 110 km de caves. « The most drinkable avenue of the world » comme l’avait surnommé Churchill qui était un connaisseur !
*La tour de Castellane, construite entre 1903 et 1905 comme emblème publicitaire de la marque de champagne. Gravir ses 237 marches vaut la peine pour contempler du haut de ses 65 m la ville d’Epernay et la vallée de la Marne. A voir aussi son musée sur l’élaboration du champagne.
*Le château Perrier, construit au XIX ème dans le style Louis XIII pour Charles Perrier propriétaire de la marque de champagne Perrier-Jouet. En 1940 il abrita le QG des armées britanniques, puis allemandes de 1942 à 1944. Après la libération de la ville par Patton, les Américains s’y établirent à leur tour !
*Le théâtre Gabrielle Dorziat, du nom d’une comédienne née à Epernay. Inauguré en 1902, il est un des rares théâtre à l’italienne dont la machinerie est encore dans son état d’origine. Mais on n’est pas au coeur du champagne pour rien : les nudités allégoriques des peintures du plafond du foyer chantent l’amour au milieu de guirlandes de raisins. Et sur la façade une sculpture évoque la vigne inspirant l’art théâtral !
*L’abbaye de Hautvillers, fondée en 650, et célèbre par son moine Dom Pérignon (1639-1715) pour ses trouvailles novatrices dans l’élaboration du champagne par assemblage de crus différents.
*Le château de La Marquetterie à Pierry. Ce pur joyau Louis XV a été construit en 1734 par un neveu du grand architecte Gabriel. Pendant la Grande guerre, le maréchal Foch en fit son quartier général. Et son énorme Renault à 6 roues, avec laquelle il sillonnait les champs de bataille, y est d’ailleurs exposée. Tombé sous le charme du château alors qu’il y était en service à l’état major en 1915, Pierre Taittinger le racheta en 1932.
*L’abbatiale St Pierre d’Orbais . Avec son architecture monumentale et sa flèche gothique qui se voit de loin, elle a été élevée au XII ème par Jean d’Orbais. Celui-ci en aurait fait le prototype de la cathédrale de Reims dont il sera le premier maitre d’oeuvre.
*Le mémorial de Dormans, sa grande tour et son ossuaire rassemblent les restes de 1500 soldats de toutes nationalités (dont seuls 11 furent identifiés) qui furent tués pendant les combats sur le front de la Marne.