C’est la mal aimée des Porschistes, car construite avec Volkswagen pour en faire une voiture bon marché. Mais 50 ans après, la Porsche 914 regagne en considération pour son originalité.
Michel Beauchamp / Champagne Beauchamp
On peut être écolo et aimer taquiner l’accélérateur. Surtout quand la voiture s’appelle une Porsche. Mais celle-ci est un cas à part dans l’histoire de la marque. Comme son propriétaire, Michel Beauchamp, vigneron à Janvry près de Reims. Un tour de son domaine avec sa Porsche 914, et vous comprenez tout de suite : choux, Seigle, féverole,trèfle blanc …Non vous n’êtes pas dans un potager. Toute cette végétation pousse entre les rangs de ses vignes ! Et cet apparent désordre végétal n’en est pas un. « Il faut faire revivre la Champagne et son sol épuisé par les traitements chimiques, explique -t-il. Depuis 20 ans, je n’y mets plus de pesticide. Et la culture des plantes légumineuses fait revenir les verres de terre indispensables pour aérer et enrichir à nouveau le sol ! »
Pas courant de tomber sur un pionnier de l’agroforestage, et qui plus est un des rares propriétaires d’une Porsche 914 de 1974. Cet anti conformiste frappé du bon sens n’a pas cédé non plus au snobisme des 911 pour se faire plaisir sur le bitume, car la 914 tient bien mieux la route grâce à son moteur central. Au point que les publicités de l’époque clamait : « Avec la Porsche 914, la courbe est le chemin le plus excitant pour aller d’un point à un autre ! » Et pourtant, seulement 115 000 Porsche 914 se sont vendues de 1969 à 1976. Et à 75% aux Etats-Unis. Car en Europe, cet atypique coupé Porsche 914 a longtemps été méprisé, et considéré comme une batarde par l’aristocratie des Porschistes ne jurant que par la 356 et la 911. Tout cela parce qu’elle n’a que 4 cylindres, résultat d’un mariage avec Volkswagen.
C’est tout de même oublier que la première Porsche 356 a été un dérivé de la Cox créée par Ferdinand Porsche, et de son moteur 4 cylindres à plat refroidi par air ! Mais en 1966 Porsche, qui a perdu une partie de sa clientèle en raison du prix beaucoup plus élevé de sa nouvelle 911 à 6 cylindres à plat lancée en 1964, a besoin d’un petit modèle d’entrée de gamme à moteur central moins couteux. Et de son côté, Volkswagen qui doit renouveler son vieux coupé bon marché Karmann-Ghia aux performances très moyennes arrive au même constat. Pour partager les frais, Ferry Porsche conclue donc un accord d’une simple poignée de main avec son ami Heinz Nordhoff, le tout premier patron de Volkswagen après la guerre.
Pour cette « Volkswagen-Porsche » deux versions sont prévues : la 914-4 avec un 4 cylindres à plat 1,7 l Volkswagen de 80 ch, et la 914-6 avec un 6 cylindres à plat 2 litres Porsche de 110 ch.Butzi, le designer attitré de Porsche (et fils de Ferry Porsche) s’occupe du développement de la voiture sur la base d’une proposition d’un bureau de style dans le mobilier contemporain. D’où sa ligne originale qui ne ressemble ni à une Porsche ni à une Volkswagen ! Et son profil quasi symétrique de chaque côté de l’arceau de sécurité esthétiquement camouflé en lunette arrière vitrée (et anti remous) ne s’expliquait pas seulement par la position centrale arrière du moteur à plat offrant une répartition des masses parfaite entre l’avant et l’arrière, et un centre de gravité très bas. La clientèle Porsche étant très importante en Californie, le cahier des charges imposait un toit amovible.
D’où ce coffre arrière de 160 l très long pour y loger le toit en polyester léger ne prenant que 3 cm sur le volume de chargement. En plus du coffre avant de 140 l, soit au total l’équivalent d’un confortable espace à bagages de berline pour une stricte deux places. A la ligne de caisse très basse grâce aux phares escamotables qui permettaient aussi de lui donner des ailes très fines se terminant par les clignotants. Les Porsche 914-4 sont entièrement fabriqués chez Karmann, le carrossier indépendant allemand , et pour les 914-6, Porsche se fait livrer les caisses à Stuttgart où le moteur six cylindres et les trains roulants spécifiques sont montés sur la même ligne que les 911.
Son 2 litres 110 chevaux, plus nerveux que le 4 cylindres 1,7 l Volkswagen, propulse la Porsche 914-6 à 200 km/h après un 0 à 100 km/h en 9,8 secondes (au lieu de 13 secondes et 183 km/h pour la 914-4). Mais cette version quasiment au même tarif qu’une 911 va être un fiasco. Car les porschistes purs et durs lui préfèrent la 911. Sa production est arrêtée au bout de deux ans après 3500 modèles vendus. Et elle est remplacée par une autre Porsche 914 en 2 litres, mais, nouvelle déchéance pour les porschistes, avec un 4 cylindres Volkswagen de 100 ch. Rien à voir avec la Porsche 914-4 de Michel Beauchamp au moteur 1,7 l un tantinet gonflée à 120 ch !
« J’ai fait modifié son arbre à cames, elle a une turbine de 911, 2 doubles carburateurs Solex à la place de l’injection, et elle grimpe à 7000 tours ! De quoi se régaler au volant de ce poids plume de 850 kg transformé en petit bolide à la tenue de route diabolique grâce à son moteur central » s’exclame -t- il. Et lui laisser des souvenirs impérissables. Amateur de rallyes, il a participé au Monte Carlo historique qui lui a laissé des impressions fortes en 2012. « C’était terrible dans les cols. On fonçait dans le noir et dans 30 cm de neige, mais ça passait ! »Aujourd’hui, il lève le pied. Dans les vignes aussi. Depuis que son fils Jules a pris la relève.
OENOTOURISME
MON VIN PRÉFÉRÉ
« L’art d’associer la nature et le champagne » indique Michel Beauchamp sur l’étiquette de sa Grande réserve Carte noire extra brut à 0 gr issu de vignes de grand cru sur Ay. Cette cuvée au joli fruité et à la belle complexité aromatique est un somptueux résultat de sa pratique des cultures légumineuses entre ses vignes pour enrichir leur terroir et de l’agroforestage dont il a été le pionnier en Champagne. « En lisière de mes parcelles j’ai planté des charmes, du sureau, des trembles pour développer les champignons puis leur miscellium excellent pour la vie microbienne du sol de mes vignes » explique Michel Beauchamp. Cet extra brut hors du commun légèrement pétillant en bouche avec une pointe vanille-miel apportée par les 2/3 Pinots noir et meunier, bénéficie d’une concentration des arômes après évaporation durant un élevage de 18 mois en barrique, avec un fruité mûr constant et non agressif. (21 €)
PROFITEZ EN POUR VISITER…
REIMS
*La cathédrale, célèbre chef d’oeuvre de l’art gothique depuis 1211, où furent couronnés 25 rois de France après le baptême de Clovis en 498. La plus longue de toutes avec ses 149 m, elle a été miraculeusement rescapée après les destructions des bombardements de 14. Le fameux « Ange au sourire », statue emblématique du porche, peut en effet afficher son soulagement !
*Les caves à champagne dans les anciennes carrières de craie, Pommery, Veuve Cliquot et son dédale de 20 km de galeries, Taittinger sous l’ancienne abbaye Ste Nicaise, et celles de Lanson dont les galeries voutées servirent de logements pendant les bombardements de la guerre de 14, et même de chapelle avec un vestige qui subsiste aujourd’hui, une statue de la Vierge toujours accrochée sur la paroi.
*Le festival de façades Art déco, symboles de la reconstruction de la ville détruite à 80 % pendant la guerre de 14
*L’Hotel musée Le Vergeur XIII éme et Renaissance construit par un riche marchand grainetier
*L’abbaye St Remi, du nom de l’évêque qui baptisa Clovis, ses parties romanes, XVII ème et son grand cloître
*L’impressionnante porte gallo-romaine de Mars du temps où Reims s’appelait Durocortorum et dépassait en importance Lutèce qui deviendra Paris
*Le palais épiscopal du Tau et sa grande salle à voûte de bois en carène de navire renversée où se tenait le festin des rois après leur sacre. Le palais abrite aujourd’hui un musée sur la cathédrale où l’on réalise, en les voyant, que les statues d’origine sur sa façade mesuraient près de 5 mètres de hauteur !
*Hôtel Jean-Baptiste de La Salle édifié à partir de 1545. Belle cour Renaissance avec avec une tour à escalier à vis ajouré
*La demeure XIIIème des comtes de Champagne
*La villa Demoiselle, splendide témoin de l’Art Nouveau construit entre 1904 et 1908 sur la butte Ste Nicaise par Louis Majorelle pour le directeur des Caves Pommery
*Le musée des Beaux-arts, un des plus beaux de province avec ses collections de tableaux et de sculptures du XVI ème au XX ème : Le Nain, Boucher, Corot, Monet, Pissaro, Renoir, Gauguin, Maillo, Marquet, Foujita, Rouault, Manessier,…
*Le phare de Verzenay, un vrai phare au milieu d’une mer de vignes construit en 1909 par le négociant en champagne Joseph Goulet pour faire la promotion de sa maison. Le rez de chaussée faisait guingette, et en 1940 les Anglais placèrent sur le phare une batterie anti-aérienne. Après restauration en 1999 le Musée de la Vigne y a ouvert ses portes.
*Les Halles du Boulingrin et leur spectaculaire voute en béton de 19,85 m de haut et seulement 7 cm d’épaisseur construite en 1927.
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POUR UNE HALTE UN CHOIX S’IMPOSE
Le Château de Sacy, appartenant à la collection Millésime, se dresse sur la montagne de Reims dans le charmant village de Sacy. Cette Maison de Maître peut accueillir tous les voyageurs passionnés d’automobiles avec un parking loin des tumultes citadins.
En plein cœur des vignes, ce joyau intimiste offre 12 chambres et suites, un restaurant avec une cuisine raffinée mettant en avant les produits du Terroir et un espace bien-être Ec(h)o en collaboration avec la marque française de cosmétique naturelle minérale Gemology.
Tout rappelle dans cet écrin l’histoire du et de la Champagne. Une parenthèse pour vous faire vivre une expérience pétillante et unique…
Château de Sacy, rue des Croisettes, 51500 Sacy.
Informations et réservations : +33 (0) 26 07 60 38 – contact@chateaudesacy-reims.fr https://www.chateaudesacy-reims.fr/
*Le fort de la Pompelle . Symbole de la résistance rémoise pendant la deuxième guerre mondiale, il fut le seul de la région à rester aux mains des Français jusqu’en 1918 au prix de 12 000 morts. Aménagé en musée des tranchées on y trouve une étonnante (et unique!) collection de 500 couvre chefs de l’armée allemande.
*La bibliothèque Carnegie, chef d’oeuvre de l’Art Déco avec son entrée en mosaïque et son gigantesque lustre suspendu en vitrail.
*Le musée automobile de Reims-Champagne, 230 autos et motos de 1908 à nos jours, un festival de Delahaye, Delage, Panhard, et de voitures à pédales ! (84 Avue Georges Clemenceau/ 03 26 82 83 84/musee-automobile-reims-champagne.com)
EPERNAY et alentours
*Flanez le long des 1500 m de l’avenue de Champagne pour admirer tous les hôtels particuliers où se sont installées les grandes marques champenoises au dessus de leurs 110 km de caves. « The most drinkable avenue of the world » comme l’avait surnommé Churchill qui était un connaisseur !
*La tour de Castellane, construite entre 1903 et 1905 comme emblème publicitaire de la marque de champagne. Gravir ses 237 marches vaut la peine pour contempler du haut de ses 65 m la ville d’Epernay et la vallée de la Marne. A voir aussi son musée sur l’élaboration du champagne.
*Le château Perrier, construit au XIX ème dans le style Louis XIII pour Charles Perrier propriétaire de la marque de champagne Perrier-Jouet. En 1940 il abrita le QG des armées britanniques, puis allemandes de 1942 à 1944. Après la libération de la ville par Patton, les Américains s’y établirent à leur tour !
*Le théâtre Gabrielle Dorziat, du nom d’une comédienne née à Epernay. Inauguré en 1902, il est un des rares théâtre à l’italienne dont la machinerie est encore dans son état d’origine. Mais on n’est pas au coeur du champagne pour rien : les nudités allégoriques des peintures du plafond du foyer chantent l’amour au milieu de guirlandes de raisins. Et sur la façade une sculpture évoque la vigne inspirant l’art théâtral !
*L’abbaye de Hautvillers, fondée en 650, et célèbre par son moine Dom Pérignon (1639-1715) pour ses trouvailles novatrices dans l’élaboration du champagne par assemblage de crus différents.
*Le château de La Marquetterie à Pierry. Ce pur joyau Louis XV a été construit en 1734 par un neveu du grand architecte Gabriel. Pendant la Grande guerre, le maréchal Foch en fit son quartier général. Et son énorme Renault à 6 roues, avec laquelle il sillonnait les champs de bataille, y est d’ailleurs exposée. Tombé sous le charme du château alors qu’il y était en service à l’état major en 1915, Pierre Taittinger le racheta en 1932.
*L’abbatiale St Pierre d’Orbais . Avec son architecture monumentale et sa flèche gothique qui se voit de loin, elle a été élevée au XII ème par Jean d’Orbais. Celui-ci en aurait fait le prototype de la cathédrale de Reims dont il sera le premier maitre d’oeuvre.
*Le mémorial de Dormans, sa grande tour et son ossuaire rassemblent les restes de 1500 soldats de toutes nationalités (dont seuls 11 furent identifiés) qui furent tués pendant les combats sur le front de la Marne.