Dans ce haut lieu du vignoble jurassien, ce bolide de 1980 coule des jours tranquilles après une existence mouvementée dans l’histoire de la marque au petit cheval cabré et celle de son boss Enzo Ferrari.
Chateau d’Arlay, Alain de Laguiche
Furieux ! Ce jour-là de 1973, les murs tremblent dans son bureau de Maranello : Enzo Ferrari, bien connu pour son caractère rugueux, jure en tempêtant qu’on ne l’y reprendra pas deux fois. Plus jamais ! C’est la première, et la dernière fois qu’il aura confié la réalisation d’une de ses voitures à un autre designer que son styliste fétiche Sergio Pininfarina. Car on s’est payé sa tête ! L’objet de son courroux s’appelle Nuncio Bertone, l’autre grand carrossier de Turin qui lui avait créé cette Dino GT 4 plutôt bien réussie au demeurant.
Mais quelques mois après son lancement en cette année 1973, stupeur ! Le Commendatore vient de découvrir aujourd’hui que la nouvelle Lamborghini Urraco mise en vente ressemble bougrement à SA Dino …Quoi ! Crime de lèse majesté au seigneur de Maranello : ce roublard de Bertone lui a en fait « refilé » le dessin du premier prototype de l’Urraco qui avait été retoqué en 1970 par Ferruccio Lamborghini ! Son rival de toujours ! Ce rustre ! Ce fabricant de tracteurs qui, lassé des pannes sur ses Ferrari, avait osé le défier en lançant sa propre marque de voitures de sport en 1963. De ce jour, Enzo Ferrari, bafoué dans son orgueil, n’adressera plus jamais la parole à Bertone.
Et voilà comment cette Dino GT 4 est la seule qui détone dans la galerie de toutes les Ferrari signées Pininfarina. Et c’est pour cette raison qu’elle figure aujourd’hui dans le garage d’un vigneron jurassien, amusé par l’histoire, et séduit par sa ligne originale qui ne ressemble pas aux autres Ferrari, et pour cause ! Il faut dire qu’Alain de Laguiche, descendant d’une famille où s’est transmis depuis le XIème siècle le plus vieux vignoble de France réputé pour son fameux vin jaune, est aussi un original dans son genre. «Oui, c’est vrai j’ai un faible pour les italiennes, reconnaît il en plaisantant sous le regard entendu de son épouse Anne. Ça a commencé tout jeune par mon admiration pour la Lancia Fulvia 1969 de ma grand-mère. »
A sa mort, la famille lui légua donc tout naturellement au début des années 90 ce joli coupé qu’il continue de bichonner précieusement. Et cette passion s’est développé avec d’autres autos transalpines, jusqu’à créer en 2002 le plus grand rassemblement d’italiennes en France dans l’enceinte du château d’Arlay, le temps d’une journée, la Giornata en italien. Tel est le nom qu’il a donné à cette concentration en mai de 400 voitures venues de tous les coins de l’Hexagone, Alfa Romeo, Lancia, Abarth, Fiat, et bien sûr Ferrari… dont la sienne depuis 2006 où il a concrétisé son rêve.
« Quand j’ai acheté cette version de 1980, la Dino 308 GT 4 n’intéressait personne car ça n’était pas une « vraie », une Pininfarina. Et du coup, elle ne valait pas plus chère qu’une Mégane Renault neuve ! Bonne pioche. Depuis, sa cote a bien grimpé…Car les collectionneurs ont fini par découvrir les vertus de cette belle auto taillée à la serpe qui succédait à la fameuse première Dino V6 246 GT (1969-1974) . Tout en gardant le même chassis et un moteur en position arrière centrale, Bertone avait réussi le prodige de rajouter deux passagers à l’arrière. D’où son nom de Dino 308 (pour 3 litres V8) GT 4 (pour 4 places).
Une auto gentiment joueuse dans le rugissement de ses 255 chevaux qui emmenaient ce vrai karting à 250 km/h après un 0 à 100 km/h en 7 secondes. Un joli score pour l’époque alors qu’aujourd’hui une 208 GTI fait aussi bien… Mais pour le plaisir à bord, la Dino en offre beaucoup plus par sa bande son, son habitacle tapissé se cuir, sa position de conduite, son panorama sur un tableau de bord très stylé sport, sa mythique grille chromé de levier de vitesses, ou sa superbe sellerie aux 4 places. Et si elle fut un peu méprisée dans son histoire, cette Dino 308 GT 4 n’en aura pas moins été vendue à 2826 exemplaires durant son existence de 1973 à 1980.
LA MÊME MARQUE AUJOURD’HUI
Ferrari 812 Superfast, et superbellissima Jamais Ferrari n’avait sorti une voiture aussi puissante et rapide avec 800 chevaux sous ce magnifique capot interminable. Elle a a du coffre avec son V12 de 6,5 l. Et cette diva du bitume offre un concert inoubliable avec des envolées lyriques aussi époustouflantes que ses accélérations : un 0 à 200 km/h en seulement 7,9 secondes ! Pour parvenir à de telles performances, dignes de la Formule 1, les sorciers de Maranello ont déployé des trésors d’imagination en mécanique et en aérodynamique. D’où un profil très sculptural pour faciliter les écoulements d’air et plaquer la voiture au sol…lire la suite
OENOTOURISME
Mes vins préférés
Ici dans les caves du château d’Arlay, le vin vieillit plus longtemps qu’ailleurs dans le Jura, « pour que mes bouteilles de très longue garde, de 50 à 80 ans, expriment au maximum la complexité aromatique de notre terroir exposé plein sud » explique Alain de Laguiche. Le fameux vin jaune ne voit ainsi le jour qu’après 7 ans d’élevage sous voile en barrique sans ouillage, un nectar qui fait office de vitrine du savoir faire Jurassien en France et à l’étranger où le château exporte 46 % de sa production. Le domaine de 25 ha cultivé à 80% en bio garde encore en partie de vieilles vignes à faibles rendement plantées entre 1953 et 1974 . Alain de Laguiche, aux manettes depuis 1990, met un point d’honneur à perpétuer la tradition des vins d’autrefois avec des assemblages dés la vendange et non à partir de vins vinifiés séparément, des élevages en vieux futs, ni collage ni filtration, et des étiquettes inchangées depuis 1917 !
-Vin Jaune 2008, fleuron du domaine, ce « grand cru du Jura » au nez puissant exhale ses aromes de savagnin à la riche palette entre noix séchée, noisette, champignons des bois, truffe sur un délicat bouquet fruité (45 €)
-Vin Blanc Tradition 2012, un assemblage 70% chardonnay qui garde une belle typicité jurassienne procurée par ses 30% de savagnin aux notes de noisettes sur une finale un peu saline (16,50 €)
-Vin Rouge Pinot Noir 2011, élevé en vieux foudres pour assouplir ses tanins, ce rouge légèrement épicé développe des aromes de cassis et de griotte sur une fine trame minérale (14 €)
Profitez en pour visiter…
– Les vestiges de la forteresse médiévale d’Arlay et le château rebâti au XVIII ème sur les caves d’un ancien couvent, avec ses salons et chambres meublés et son originale bibliothèque à la cheminée dissimulée derrière des livres postiches.
–Le village de l’Etoile, pittoresque bourgade qui a donné son nom à l’un des plus réputé vin du Jura qui doit son nom aux fossiles en formes d’étoiles trouvés sur son terroir. Joli point de vue du haut de la colline où se trouve le vignoble de Philippe Vandelle qui vaut le détour pour une dégustation.
–La reculée du cirque de Baume, à voir depuis le belvédère de Crançot, juste à côté de l’hôtel-restaurant Le Belvédère à l’excellent menu local à déguster sous les grands arbres de sa terrasse délicieusement ombragée en été. Un autre point de vue complètement différent vaut la peine depuis Granges-sur-Baume où l’on plonge sur l’abbaye en contrebas qui vous invite à y descendre…
–Abbaye de Baume-les-Messieurs, fondée au VI ème siècle, on y rentre par un passage vouté, sous l’ancienne hôtellerie et le donjon, qui débouche sur la façade de l’église romane où la nef du XIIème est dallée de pierres tombales. Après l’ancien cloitre qui a conservé sa fontaine centrale, une autre cour donne accès aux anciens logements des chanoines.
–Grottes de Baume, un fantastique voyage dans les tréfonds de la reculée à travers les salles souterraines et leurs forêts de stalactites. A voir aussi à l’extérieur les encorbellements de la cascade des tufs.
–Poligny, capitale du gruyère de Comté à l’entrée de la reculée de Vaux, son Hôtel Dieu du XVII ème avec son cloitre, sa pharmacie et ses pots en faïence, sa cuisine voutée et son réfectoire. Autres curiosités : le couvent des Clarisses fondé en 1415, la collégiale St hippolyte du XV ème et ses magnifiques statues bourguignonnes, la Grande-Rue bordée d’hôtels particuliers, l’église romane de Mouthier-Viellard et son retable en albâtre du XV ème
–Salins-les-Bains, la descente dans les galeries voutées des salines et l’énorme roue hydraulique en bois de la pompe à balancier qui remontait les eaux salées laisse un souvenir inoubliable. A voir aussi, un des plus beaux exemples du gothique bourguignon cistercien du XIII ème, l’église St Anatoile.
–Arc-et-Senans, la grandiose saline royale en demi cerce de 235 m de diamètre dessinée au XVIII ème par le grand architecte Ledoux qui avait imaginé une ville circulaire où était exploité les eaux saumâtres de Salins amenées jusque là par des conduites en bois sur une trentaine de kilomètres.
–Château-Chalon, ce vieux village pittoresque perché sur un escarpement rocheux au dessus de son fameux vignoble en pente offre un panorama splendide sur la plaine jurassienne.
–Le château du Pin, son imposant donjon carré du XV ème domine la campagne environnante.
–Lons-le-Saunier, encore une ville qui doit son nom à l’exploitation jadis de sa saline. Sa rue du Commerce est pleine de charme avec son enfilade d’arcades du XVI ème qui débouche sur la place de la Liberté où la tour de l’Horloge marque l’emplacement des anciennes fortifications de la ville. Le musée dans l’Hôtel de ville vaut le détour pour ses tableaux de Breughel, Courbet ou ses statues de Falconet et Perraud. A voir aussi l’une des plus vieilles églises de Franche Comté, St Désiré du XIème, et l’amusant musée de la Vache qui rit, Lons étant la ville natale du célèbre bovidé hilarant.
–Montaigu, c’est dans ce joli vieux village perché sur un éperon rocheux au dessus de Lons que l’auteur de la Marseillaise, Rouget de l’Isle vécut sa jeunesse. Alors que Lons-le-Saunier le revendique aussi, car sa mère y accoucha en descendant au marché de la ville !
–Le musée de véhicules anciens de Perrigny, tout proche du centre de Lons, ce hall d’exposition regroupe plus d’un cinquantaine de voitures et autant de motos où l’on retrouve avec plaisir vieilles Citroën, Peugeot ou Renault, des Simca, une superbe Hotchkiss, quelques anglaises… Un voyage dans le temps qui fait rêver petits et grands. Grâce à la passion et la patience du transporteur Paul Bonnicel à l’origine de ce musée ouvert en 2017.
393 Rte de Conliège à Perrigny Tel 03 84 48 42 07
–La ligne des Hirondelles, nom du train en partance de Dole au parcours pittoresque en forêts et montagnes qui emprunte sur 123 km 36 tunnels (dont certains au tracé en en fer à cheval !) et 18 gigantesques viaducs en courbes débouchant au dessus de Morez pour une impressionnante descente jusqu’à la gare de Saint Claude. Vues imprenables garanties. A voir, la cathédrale fortifiée et ses splendides stalles en bois sculpté.
–Dole, capitale de la Franche-Comté pendant des siècles, la ville resplendit de son histoire par ses monuments dans ses ruelles étroites et tortueuses bordées de jolies maisons à tourelles du XVème- XVIIIème aux cours intérieures avec escaliers couverts en bois ou en pierre. L’église Notre-Dame du XVI ème et son clocher carré de 75 m était le phare de la cité où un guetteur signalait jadis les incendies au porte voix. L’ancien Hôtel-Dieu Renaissance et sa splendide cour en galeries à colonnades, les collèges, les couvents et les hôtels particuliers aux cours à balustrades jalonnent la cité qui domine l’ancien quartier des tanneurs le long d’un canal. On peut y visiter la maison natale de Pasteur où son père, limogé de l’armée impériale après la chute de Napoléon, avait repris ce métier.